Quand la baisse des compétences des salariés dégrade la productivité et compromet l’avenir. Le cas du BTP
Les liens entre dynamique économique et évolution de l’emploi ne sont pas univoques. Un secteur dont les ventes croissent peut réduire ses effectifs salariés si la part de ses importations augmente ou s’il réalise des gains de productivité plus importants encore. À l’inverse, ce n’est pas parce qu’une activité crée de l’emploi qu’elle se développe ou qu’elle progresse, en tout du point de vue de l’efficacité économique.
Le repli amorcé en 2023 (-1.1% d’après l’enquête emploi de l’INSEE) atténue cette croissance indéniable mais le bilan quantitatif reste très positif. Pourtant la nature des emplois structurant cette activité a profondément évolué, au point où l’on peut parler d’une perte très nette de savoir- faire, de compétences et de qualification.
À l’heure où le BTP doit s’adapter à une transformation profonde de ses marchés, sa capacité à mobiliser les compétences nécessaires pour répondre au développement de la rénovation des logements, de la préfabrication et de la transition environnementale paraît compromise. Quelles sont les causes de cette dégradation et comment y remédier ? Quelles conséquences a-t-elle sur l’efficacité des entreprises et leur potentiel de développement ?
L’exemple du Bâtiment et des Travaux publics illustre cette contradiction. Depuis 2015, le BTP a créé plus de 274 000 nouveaux emplois en France (URSSAF).
Une « déqualification » de la main d’œuvre
L’analyse de la structure des secteurs d’activité composant le BTP en terme de métiers (ou de Catégories socio-professionnelles pour être plus précis) montre une tendance largement répandue à la diminution du poids relatif des métiers techniques qualifiés.
C’est souvent le cas dans le gros œuvre.
- Travaux de terrassement courants (code APE 4312A) : repli de 6 points de pourcentage des « autres ouvriers qualifiés des tra vaux publics » et progression de plus de 10 points des « ouvriers non qualifiés des travaux publics et du travail du béton)
Graphique 1 : évolution comparée du poids des « autres ouvriers qualifiés des TP » et des « ouvriers non qualifiés des TP et du tavail du béton » dans le secteur des Travaux de terrassement courants et travaux préparatoires. Source DSN INSEE.
- Construction de maisons individuelles (4120A) : là aussi, inversion des courbes entre les maçons qualifiés et les ouvriers non qualifiés du gros œuvre, avec une variation de dix points dans chacun des deux métiers.
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Graphique 2 : évolution comparée du poids des « maçons qualifiés » et des « ouvriers non qualifiés du gros œuvre du bâtiment » dans le secteur de la construction de maisons individuelles. Source DSN INSEE.